Hans Hartung

1904 - 1921 : Une jeunesse allemande

Né le 21 septembre 1904 à Leipzig, berceau du romantisme allemand, Hans Hartung vit une jeunesse dans un milieu plutôt bourgeois. Son père est médecin ; sa mère, de santé fragile, l’initie particulièrement à la musique qui demeurera une grande passion. Hans Hartung est très tôt fasciné par le ciel, notamment par les éclairs. Enfant très ingénieux, il fabrique lui-même son propre télescope et son propre appareil photographique. Il envisage un temps, pendant l’adolescence, de devenir pasteur. La première guerre mondiale le marque beaucoup et, dès ses 12 ans, il signe de son patronyme des scènes où il imagine les soldats combattant sur le front.

1922 - 1931 : La naissance de l’abstraction

Alors qu’il n’est encore qu’au lycée, Hans Hartung expérimente en 1922 des productions artistiques à base de taches informelles, aléatoires, faites à l’encre ou à l’aquarelle sur papier. Cette pratique marque chez lui la naissance de l’abstraction. Après avoir eu son baccalauréat en 1924, il se forme à l’Akademie für graphische Künste und Buchgewerbe de Leipzig, puis à la Hochschule für der bildenden Künste de Dresde, à l’Académie d’André Lhote à Paris et enfin à l’Akademie der bildenden Künste de Munich en 1928. Il se passionne pour les expressionnistes allemands, qui l’inspirent, mais surtout pour Rembrandt et Goya. Il rencontre et épouse Anna-Eva Bergman en 1929. Une première exposition personnelle lui est consacrée à la galerie Kühl à Dresde, en 1931.

1932 - 1939 : Un homme en exil

Le père de Hans Hartung meurt en 1932 sans laisser d’héritage.  Avec  Anna-Eva Bergman, il part vivre à Minorque jusqu’en 1934. Ami avec des juifs et des communistes, artiste abstrait, il est malmené par la Gestapo à Berlin en 1935 et s’exile à Paris où il fréquente Jean Hélion, Alexander Calder et les époux Delaunay. Il commence à connaître un embryon de reconnaissance : le grand collectionneur américain Albert Eugene Gallatin lui achète des œuvres. Tandis qu’Anna-Eva Bergman le quitte en 1937, il rencontre le sculpteur espagnol et fervent républicain Julio González dont il va épouser la fille Roberta. Quand la guerre éclate, Hartung refuse de servir le drapeau allemand et rejoint la Légion étrangère côté français.

1940 - 1947 : Les années noires

Légionnaire, Hans Hartung est envoyé en Algérie en 1940 mais ne combat pas. Démobilisé après la défaite française, il se réfugie clandestinement dans le Lot jusqu’à ce que l’invasion allemande de la zone libre l’oblige à fuir vers l’Espagne, au prix de nombreux dangers. Il y est emprisonné de longs mois, puis il se réengage dans la Légion étrangère. En 1944, blessé lors de la bataille des Vosges, il se fait amputer par deux fois la jambe droite. Après une longue convalescence, il reprend son travail de peintre là où il l’avait laissé avant la guerre. Une première exposition personnelle lui est consacrée en 1947 à la galerie Lydia Conti quelques mois après avoir acquis la nationalité française.

1948 - 1959 : « Reconnecter les circuits détruits »

Les années d’après-guerre sont l’occasion pour lui de « reconnecter les circuits détruits » comme il l’écrit dans ses mémoires. Les succès commencent à arriver, en France, mais aussi en Allemagne et aux États-Unis. Il est l’objet d’un grand intérêt de la part de la critique qui l’érige en maître de
l’« abstraction lyrique » et de « l’École de Paris ». Il retrouve Anna-Eva Bergman en 1952 et en retombe extrêmement amoureux. Il l’épouse une seconde fois en 1957. Le couple n’aura pas d’enfant. Hartung développe une peinture d’apparence très gestuelle et spontanée mais qui s’avère bien souvent le fruit d’une lente élaboration maîtrisée. Il se consacre par ailleurs beaucoup à la photographie.

1960 - 1972 : La gloire mondiale

Hartung est lauréat du Grand Prix international de peinture lors de la Biennale de Venise de 1960. Au même moment, une rupture s’opère dans sa technique : il commence à expérimenter les peintures industrielles et de nombreux outils. Il vend beaucoup et intègre les plus grandes collections mondiales. En 1966, son vieil ami historien de l’art Will Grohmann le place en pionnier de l’abstraction informelle en publiant un ouvrage remarqué : Aquarelles 1922, chez Erker. Une grande rétrospective lui est également consacrée en 1969 à Paris. Hartung est invité partout, des États-Unis au Japon, et travaille par ailleurs avec acharnement sur la conception de la villa-atelier d’Antibes.

1973 - 1980 : L’installation à Antibes

Le 19 décembre 1973 est signée la réception de travaux de la villa d’Antibes. Hartung a épuisé dans ce projet plusieurs architectes avant de collaborer efficacement avec Jean Heams, Gérard Vollenweider mais surtout Mario Jossa, l’associé de Marcel Breuer. Dans ce lieu exceptionnel, non seulement Hartung se réinvente avec l’appui des assistants et du personnel à son service, mais il œuvre à sa postérité : il organise ses archives, reçoit de nombreux invités et publie ses mémoires (Autoportrait chez Grasset) en 1976. Quoique son exposition de peintures récentes au Metropolitan de New York soit un relatif échec en 1975, Hartung vit incontestablement une phase heureuse de son existence.

1981 - 1989 : Le grand lâcher prise

Au fur et à mesure qu’avance la décennie 1980, Hartung multiplie les expressions de vitalisme et d’énergie. Pourtant, ces temps ultimes sont aussi ceux d’une solitude progressive et des deuils. Hartung est désespéré par la mort d’Anna-Eva Bergman en 1987. Il ne vit alors plus que pour la création, avec le recours de plus en plus effusif, jubilatoire et débordant à des projections de peinture où il transcende l’âge et l’infirmité. Un immense lâcher-prise artistique s’opère. En 1989, il est promu grand officier de la Légion d’honneur. Sa dernière toile, T1989-N10 est achevée le 16 novembre, une semaine exactement après la chute du Mur de Berlin. Il décède le 7 décembre à 22 heures 50.