Commissariat : Musée Courbet.
Avec l’apport scientifique de la Fondation Hans Hartung et Anna-Eva Bergman.
Cette exposition regroupe un ensemble d’œuvres d’artistes historiques qui, de Gustave Courbet à Hans Hartung, cherchent à exprimer, avec des moyens plastiques audacieux, singuliers et novateurs, le concert de petites expériences, commotions, émotions qui traversent confusément corps et esprit au contact de la nature. Là où l’approche classique tend à la retranscription purement visuelle du spectacle du monde, il s’agit d’œuvres où se joue une perception multi-sensorielle et plus intériorisée : d’où son titre de « sensations ». Ce terme revient obstinément dans les propos de Cézanne. Il est comme une sorte de clef d’entrée à son œuvre et à sa démarche et il sert de prisme à cette exposition. Pourtant, quoique récurrent dans l’histoire de l’art, le vocabulaire de « sensation » n’existe qu’en sourdine, demeure discret, et souffre en tout cas de la concurrence écrasante, auréolé d’un succès stupéfiant, du concept d’impression et du célébrissime mouvement qui l’a érigé en bannière. Mais le mouvement impressionniste, bien circonscrit dans le temps (1874 à 1886 si l’on s’en tient aux dates officielles du groupe) croyait surtout à l’idée d’une figuration de la perception immédiate de la nature. La notion de sensation est plus chaotique, et plus riche : elle intègre la corporalité, la subjectivité et désigne l’ensemble des frémissements infinitésimaux, des bouleversements insaisissables qui, en ordre dispersé, traversent les artistes. Comment ceux-ci parviennent-ils à dire, sur la toile, ce tumulte physique et psychique? Comment véhiculer, sur la planéité du tableau, la profondeur de ce rapport avec l’environnement extérieur, depuis la minéralité des pierres jusqu’à l’immatérialité des ciels ? On verra que les réponses apportées à ce défi par les peintres des XIXème et XXème siècles et par le sculpteur Giuseppe Penone sont extraordinairement divers, jusqu’à proposer, au fil du temps, des variations totalement opposées. Tandis que Courbet travaille sur la trituration et l’empattement terreux de sa matière picturale, que Cézanne associe l’éclaircissement de la palette et une compacité synthétique, Bonnard cherche le surgissement lumineux presque aveuglant, Anna-Eva Bergman latransparence par l’usage de la feuille de métal et Hans Hartung va jusqu’à utiliser les éléments végétaux pour élaborer des toiles abstraites. Par-delà la diversité de ces expériences et de leur traduction plastique, cette exposition est l’occasion de voir comment les beaux-arts ont accompagné le développement d’un nouveau rapport au monde durant la période contemporaine, où s’affermit « le sentiment de soi » et où la nature s’apparente à un Eden perdu dans une société qui s’urbanise massivement. En plus de sa valeur esthétique, « Sensations de nature » n’est donc pas exempte d’une dimension sociale, culturelle et même philosophique : son catalogue bénéficie à ce titre des contributions exceptionnelles de l’historien Georges Vigarello et de l’Académicien Jean-Luc Marion.
Liste des artistes exposés : Paul Cézanne, Gustave Courbet, Camille Pissarro, Alfred Sisley, Claude Monet, Paul Signac, Paul Sérusier, Pierre Bonnard, André Masson, Fernand Léger, Nicolas de Staël, Anna-Eva Bergman, Hans Hartung, Giuseppe Penone.
« Sensations de nature : De Courbet à Hartung »
Du 4 juillet au 12 octobre 2015
Musée Courbet
1 Place Robert Fernier
25290 Ornans
+33 (0)3 81 86 22 88
Illustration de couverture: Anna-Eva Bergman, N°2-1966 Finnmark Hiver (Hiver horizon du Nord), 1966, vinylique et feuille de métal sur toile (détail).
